Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…

Le sujet de ce film est double : la description du milieu du théâtre new-yorkais d’une part et le destin de Riggan Thomson d’autre part. La majeure partie du film à Broadway a été tournée au St. James Theâtre, situé sur la 44e rue, en plein Times Square. Nous sommes là au cœur du show business avec ses acteurs mégalos et narcissiques et leurs petites histoires de coucherie, avec les critiques haineux, les spectateurs consommateurs. Mais ce n’est pas la meilleure partie du film et nous avons déjà vu ce sujet mieux traité, par exemple dans La Vénus à la fourrure de Polanski.

L’autre volet, le parcours du personnage principal, est bien plus fort et original. Le réalisateur Alejandro Gonzales Inarritu a choisi un acteur à l’itinéraire similaire, Michael Keaton, qui a connu la gloire au début des années 90 en jouant le rôle de Batman dans les films de Tim Burton, avant de connaître un « passage à vide ». Le héros de Birdman n’appartient pas au milieu du théâtre et lutte pour s’imposer. La dimension surréaliste est omniprésente tout au long du métrage. En effet, l’ego de Riggan est si torturé qu’il a parfois bien du mal à distinguer rêve et réalité. De plus, l’ombre de Birdman, l’homme oiseau, son rôle hollywoodien dans les blockbusters où il a triomphé, rôde d’une manière à la fois menaçante et comique. Cette présence apporte une originalité bienvenue dans cette œuvre dont les principaux mérites sont le travail de la caméra et la musique.

Tout le film est une succession de très longs plans-séquences dont le premier est remarquable car il se déroule sur plusieurs jours, va des loges au plateau où ont lieu les répétitions, glisse et virevolte autour des personnages sans jamais se faire agressif et sans gros plans comme c’est la mode en ce moment. Nous sommes pris sous le charme de la caméra, un instant de pur bonheur cinématographique.

L’autre grand plaisir du film est la bande son. L’un des meilleurs batteurs du monde, le Mexicain Antonio Sanchez – que l’on aperçoit à deux reprises — a improvisé plus de 60 morceaux pour l’occasion. Le rythme de la musique est intimement lié aux mouvements de caméras qui eux sont liés au cheminement intérieur de Riggan, liant ainsi le tout en un ensemble harmonieux. Il est rare de trouver une symbiose aussi fine entre la musique et l’action. Finalement, et c’est plutôt rare, ce film mérite d’être vu plus pour sa forme que pour son fond.